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Europe in Strasbourg

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Culture Littérature - Book1

Appel de Strasbourg pour la paix

Amicale du conseil de l'europe

APPEL DE STRASBOURG

 

Le 20e siècle a vu les puissances du Vieux-Continent, rendues enragées par les nationalismes et l’avidité coloniale, plonger le monde par deux fois dans les plus monstrueuses des guerres. Avec la Shoah, qui restera à jamais douloureuse et indélébile dans nos mémoires, l’humanité a atteint la limite extrême de la barbarie.

 

De Yalta en février 45 jusqu’à la chute du Mur de Berlin en novembre 89, le monde s’est trouvé piégé dans une guerre froide entre l’Est et l’Ouest qui a fait vivre l’humanité sous la menace constante d’une catastrophe nucléaire. A Cuba, en octobre 1962, il y a 50 ans jour pour jour, les missiles avaient été armés et le compte à rebours avait été lancé.

 

Ce siècle qui a connu tous les malheurs et la pire des menaces a vu enfin émerger la lumière et a pu commencer un long chemin vers la paix. La réconciliation franco-allemande en a été une étape essentielle, elle a ouvert la voie à la construction européenne et par-là au renforcement d’un processus de paix dans le monde. Dans cette démarche, les écrivains ont été parmi les premiers et les plus engagés. Certains sont signataires de cet appel, ils étaient impliqués dans ces évènements historiques qui ont fait renaître l’espoir. Nous les saluons tout particulièrement.

 

Mais le projet de paix ne concernait que l’Occident. On avait oublié le reste du monde, des dizaines de pays massés à la périphérie, qui comptaient pourtant plus des quatre-cinquièmes de la population mondiale, livrés au sous-développement et aux dictatures. Parce que la paix n’était pas pour tous, elle ne pouvait être durable. Et nous voilà de nouveau face à d’immenses dangers. La pollution et le réchauffement de la planète pourraient demain anéantir autant que le menaçait la tempête nucléaire dans l’ancien schéma de la terreur. La pauvreté, les maladies, la délinquance endémiques feront le reste. Le terrorisme, une nouveauté bouleversante à cette échelle, avance à une vitesse effrayante, et les idéologies qui le nourrissent connaissent des voies nouvelles, notamment à travers l’instrumentalisation des religions à des fins politiques

 

L’évolution de certains pays fait craindre le pire. Le fondamentalisme barbare, ancré dans l’Afghanistan des Talibans, n’a cessé de s’étendre et de provoquer en contrecoup des états de quasi guerre dans le reste du monde. Les points de tension se multiplient, en Afrique notamment, et les poches d’islamisme radical qui se développent dans maints pays arabes et musulmans, et jusque dans les pays démocratiques les plus éloignés de l’épicentre, menacent de s’étendre à la planète dans son ensemble. D’ores et déjà, des valeurs essentielles telles que la liberté d’expression et de conscience sont en péril.

 

Face à cela, la communauté internationale reste incroyablement inefficace. L’Amérique et l’Europe tergiversent, la Russie et la Chine pratiquent le blocage, paralysant ainsi l’action des Nations-Unies.

 

Le « printemps arabe » a créé des espoirs et des opportunités, notamment pour ce qui concerne la démocratisation, mais il a aussi libéré des tensions internes énormes dans les pays arabes et musulmans, qui vont s’aggravant et poussent aux surenchères. L’émergence de partis islamistes très organisés, disposant de milices puissamment armées, et leur arrivée au pouvoir dans ces pays sont le signe d’une marche vers le fondamentalisme. Dans le chaos qui se profile, l’Iran accélère son programme nucléaire pour réaliser ses prétentions hégémoniques au plan politique, militaire et religieux, et les pays arabes de la région pourraient être entraînés à s’y lancer à leur tour.

 

Dans ce contexte, Israël est plus directement menacé que jamais. Face à une situation complexe et dangereuse, il pourrait être tenté d’agir seul. La décision de frapper l’Iran est sur la table, même si Israël pourrait se trouver par là même sur le point d’être menacé dans son existence. La situation déjà fragile au Moyen Orient va se détériorer. Encore une fois, les Palestiniens et les Israéliens épris de paix feront les frais de jeux d’intérêts qui leur sont étrangers.

 

Israël maintient les Palestiniens sous occupation depuis plus de 45 ans, et cette situation inhumaine et immorale doit cesser. Les deux parties posent des conditions irréalistes pour reprendre les négociations, et pendant ce temps le gouvernement israélien fait construire de plus en plus de colonies, qui empêchent la réalisation d’une paix durable. Nous appelons instamment les deux parties à se lancer immédiatement et sans conditions dans des négociations sincères et sérieuses. Le blocage actuel met en péril la paix dans la région et dans le monde.

 

Il est urgent que la communauté internationale intervienne fermement pour mettre sous contrôle le programme nucléaire iranien et s’engage résolument dans le règlement du conflit israélo-palestinien, en poussant les parties à ouvrir immédiatement un vrai dialogue direct, devant aboutir au plus tôt à la création d’un Etat palestinien, à côté de l’Etat d’Israël, les deux dans des frontières sûres, sur la base de compromis douloureux pour les deux parties mais nécessaires à la paix, comme l’abandon des colonies ou leur échange contre des terres, le renoncement au droit au retour des réfugiés de 1948, le partage de Jérusalem. C’est encore –mais peut-être plus pour longtemps - une solution possible et des deux côtés, il existe des femmes et des hommes capables de la réaliser. Aidons-les à le faire.

 

En Syrie, le printemps arabe a débouché sur une crise d’une gravité exceptionnelle, qui menace ce pays et son peuple dans leur existence même. Le régime d’El Assad massacre méthodiquement son peuple. Seize mois – et près de 30.000 morts - après le début de la révolution syrienne, il poursuit ses crimes en toute impunité, encouragé en cela d’une part par l’Iran, la Russie et la Chine, et d’autre part par les tergiversations et les atermoiements de la communauté internationale. La conscience humaine gardera longtemps en mémoire les séquelles de cette tragédie.

 

 

Sur cette toile de fond, nous écrivains signons notre engagement pour la paix et déclarons ce qui suit :

 

  • La paix est un bien commun irremplaçable et sa défense est une obligation commune. En en faisant l’affaire de tous, nous éviterons que la paix globale recherchée ne soit à la fin la paix pour l’un au détriment de l’autre.

           

  • Les écrivains ont leur part dans ce combat et nous exprimons ici notre détermination à l’assumer avec fermeté et objectivité. Nous exhortons tous les écrivains dans le monde à nous rejoindre. Ensemble, nous pouvons influencer les décideurs et l’opinion publique et ainsi peser sur le cours des choses, afin que les valeurs de la paix soient renforcées partout dans le monde. Nos moyens dans ce combat sont la littérature, le débat, la vigilance. Peut-être n’est-ce pas grand-chose, mais c’est notre façon de préserver notre dignité dans un monde empreint de violence et de cynisme.          
  • Le rassemblement mondial des écrivains pour la paix n’est pas un parti politique et n’a pas vocation à intervenir dans les questions de politique intérieure de tel ou tel pays. Cela est l’affaire de chacun selon ses convictions et ses engagements personnels. Toutefois, la paix et les valeurs qui la sous-tendent - les droits humains, la démocratie et la culture – ne sont pas seulement des affaires intérieures : elles sont universelles. C’est pourquoi le rassemblement prendra position sur ces questions. Il le fera sans concession. Là est son champ d’action, là est sa ligne.      
     
  • Le rassemblement travaille en réseau, le plus large possible. Il se dotera d’un secrétariat pour optimiser la circulation de l’information entre ses membres et l’organisation de ses actions. Tous les deux ans, il désigne un « primus inter pares » pour le représenter et piloter ses activités.

 

  • Le rassemblement constituera, dans les meilleurs délais, des groupes de travail pour formuler des propositions - et développer des actions - pour contribuer au règlement des situations les plus urgentes.

 

  • Le rassemblement cherchera toutes les synergies possibles avec les organisations nationales et internationales dont la paix et la culture sont les missions.

 

 

Strasbourg, le 11 octobre 2012